La vie du T°

PAROLES DE SPECTATEURS #1

Nous souhaitons donner la parole aux spectateurs.
Nous leur avons demandé de nous raconter leur amour du théâtre, leur première fois, leurs souvenirs, leurs émotions…

Pourquoi j’aime le théâtre par Alain Michel

J’ai découvert le théâtre quand j’étais étudiant Il y a donc bien
longtemps ! Et je ne me souviens plus très bien dans quel ordre mais
j’ai fait mon initiation avec lui et avec la danse contemporaine
grâce à ce qui était alors la Maison de la Culture de Rennes,
aujourd’hui siège du TNB dirigé par Arthur Nauzyciel.

Pour la danse (comme c’est toujours encore le cas), j’ai oublié le
titre de ma première pièce, mais pas celui de la compagnie : le
Harkness Ballet de New York. Je n’en trouve plus aucune trace sur
Internet ! En 1970 ou peut-être 1971, ce spectacle m’avait subjugué
et depuis je suis un grand amoureux de la danse contemporaine. 

Ma découverte du théâtre remonte à la même époque. J’ai assisté à
de belles mises en scène que je peux encore citer, malgré le temps
passé : Capitaine Schelle, capitaine Eçço de Rezvani (par Jean
Pierre Vincent), La Cuisine ( Ariane Mnouchkine), L’Irrésistible
ascension d’Arturo Ui
Six personnages en quête d’auteur ; j’ai
aussi en mémoire Le Grand Magic Circus de Jérôme Savary. Voici au
moins pour mes souvenirs initiatiques ! C’est  grâce à eux que je
crois à la nécessité absolue de faire accéder les jeunes au
bonheur du spectacle vivant. La théorie de l’ensemencement ? N’est-ce
pas la raison de ma capacité à citer des pièces vues voici
cinquante ans alors que j’ai souvent moins de mémoire pour les plus
récentes ! Heureusement maintenant je garde les feuilles de salle !…Et je les consulte à l’occasion.

Jeune adulte, mes occupations professionnelles et familiales m’ont
éloigné du spectacle vivant ou je n’en n’ai conservé aucun souvenir
marquant… Ai-je même fréquenté des théâtres ? 
Mais j’en conservais sans doute la nostalgie pour choisir de renouer avec le
spectacle par le festival d’Avignon. C’était, je crois, vers la fin des
années 80. Pas du tout initié aux « codes » du festival , et trop
intimidé par le In, dans mon esprit réservé à une élite, j’ai
découvert le Off. Cela m’a plu et j’y suis retourné l’année
suivante et chaque année depuis… d’abord quelques jours seulement,
privilégiant peu à peu le In, puis totalement. Faisant tomber mes
préjugés de départ sur son accès difficile. 
Le plus difficile pour le néophyte c’est d’avoir des billets et de choisir son programme mais il faut simplement oser aller à la découverte et les tarifs
sont à la portée de la plupart.

Désormais, retraité, j’y reste plus longtemps et j’y consacre la
totalité de mes vacances estivales, grâce surtout à la chance
d’avoir découvert, par AirBnb, depuis plusieurs été, un modeste
studio magnifiquement placé, en plein coeur de la ville, et bon
marché, ce qui me permet de consacrer l’essentiel de mon budget aux
spectacles.

Mon goût pour le théâtre s’est affirmé et affiné année après
année. Ce que, au début, j’excluais par peur m’est devenu peu à
peu plus familier. Par exemple, les pièces en langue étrangère avec
un sur-titrage (j’en ai vu d’inoubliables), ou des pièces de très
longue durée ( j’ai fait l’expérience, elle aussi inoubliable de 2066, près de douze heures !!…). Sans doute, ne devient-on pas amoureux du théâtre du jour au lendemain, comme on ne devient pas œnologue à son premier 
verre ! On l’apprivoise ! Mais quel bonheur !

Pour répondre à la question – pourquoi j’aime le théâtre ? – je
précise que je n’aime pas toujours le théâtre, notamment quand il
est vulgaire ou, à l’inverse, ésotérique. Pour que je l’aime
vraiment il faut un bon texte, de bons interprètes, une bonne mise en
scène, trois exigences préalables. Et il faut également qu’il
m’apporte quelque chose : une émotion, un autre regard sur le monde
dans lequel je vis. Le théâtre, mais je crois pouvoir ajouter l’art
dans son ensemble, répond souvent à des questionnements actuels en
apportant, parce que c’est son essence, une esthétique, parfois de
la poésie, parfois de la nécessaire provocation. 
Je vais au théâtre pour y être ému, parfois bouleversé, parfois pour en
sortir plus intelligent. Je l’aime quand il répond à cela. Le
théâtre, en supplément à l’éducation, à la lecture, participe
à la construction de l’individu. Il permet aussi, à l’occasion, de
découvrir des auteurs ignorés ou de les rendre plus accessibles.
Mais en approfondissant ma réflexion je remarque que ce que j’aime
dans le théâtre je l’aime aussi dans le cinéma, la littérature. 

Au fond, je ne sais pas si ce que j’aime ce n’est pas plutôt le fait
d’être interpellé et par là de me sentir vivant.

Alain MICHEL

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